Date butoir ou pas date butoir : telle est la question ?

Depuis quelques temps nous voyons passer la mention à une date butoir pour des cirques sans animaux. Voici notre position.

Code Animal lutte depuis 10 ans contre la captivité 

Notre association a était l'une des premières à s'intéresser de près à la captivité des animaux sauvages dans les divertissements de France et d'ailleurs. L'une des campagnes que nous menons depuis des années est sur les animaux dans les cirques. Nous sommes l'association qui a co-écrit le rapport Derrière les Paillettes, le Stress (Franck Schrafstetter, Céline Paterre, Julie Lasne) qui décrypte la situation des cirques avec animaux, et des problématiques liées à ce sujet : Bien-être Animal, réglementation, trafic, etc. Notre connaissance et notre suivi à ce sujet se forgent sur des éléments de terrain et par la pratique. Code Animal a été l'un des acteurs de la mise en place de l'arrêté du 18 Mars 2011 qui règlemente aujourd'hui l'utilisation des animaux sauvages dans les structures itinérantes. 

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La réglementation actuelle ?

L'arrêté de Mars 2011 posait le cadre réglementaire d'une exploitation afin de pouvoir exercer des contrôles et commencer à sensibiliser l'opinion publique sur les conditions de détention des animaux dans les cirques. Ce cadre est aujourd'hui dépassé.

La majorité des cirques n'entrent même pas ce cadre : les documents administratifs ne sont pas à jour ou absents, des animaux ne font pas parties de l’annexe des espèces de l’arrêté (hyène, hippopotame, hybrides, etc.), des animaux ne servent qu’à l’image des cirques et ne sont pas présentés en spectacle, les quartiers d’hiver sont un point d’interrogation, les installations extérieurs ne sont pas toujours présentes, etc. etc. Des vides juridiques existent, les termes sont trop vagues. Les services de contrôles sont dépassés car pas assez d’effectifs ni de moyens alloués, les tribunaux sont engorgés, il n’existe que peu de suivi complet et centralisé des animaux. Autant de raisons qui montrent qu’une amélioration de la réglementation actuelle ne fonctionnera pas.

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Le débat est plus profond !

Améliorer la forme ne pourra en aucun cas changer le fond. La question de la présence des animaux sauvages dans les cirques est aujourd’hui devenue une revendication citoyenne.

A l’heure où la protection animale n’a jamais été aussi forte en France, une part grandissante des villes en France prennent position pour des cirques sans animaux et demandent au Gouvernement une loi nationale afin d'encadrer la transition. La majorité de la population se positionne pour une réglementation nationale également. Selon un sondafe IFOP pour la Fondation 30 Millions d’Amis en 2018, 67% des sondés se disent contre les animaux sauvages dans les cirques. Des vétérinaires ont récemment pris position dans une vidéo-tribune pour des cirques sans animaux. Des parlementaires se mobilisent au travers de questions écrites, orales, propositions de loi. Bref c’est toute une société qui est dans l’attente d’actions concrètes de la part du Gouvernement d’Emmanuel Macron.

Ce changement sociétal se ressent sur la fréquentation des cirques de France – des cirques comme Pinder sont en liquidation judiciaire, Arlette Gruss écourte sa tournée dans le sud de la France, des festivals comme à Tours retirent les animaux sauvages de la programmation.

Plus largement, dans l’Union Européenne, aujourd’hui 24 pays sur 28 se sont positionnés partiellement ou complétement contre la présence des animaux sauvages dans les cirques. Dans le monde 46 pays ont pris position. Des professionnels des animaux comme la Fédération des Vétérinaires d’Europe ont tranché la question depuis 2015 : les structures itinérantes ne peuvent en aucun cas répondre aux impératifs biologiques des mammifères sauvages dans les cirques.

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Alors on fait ?

Chez Code Animal, comme chez d’autres associations, nous pensons qu’il faut impérativement encadrer cette transition qui est de toute façon en train de se produire en France. Une transition qui ne se fera pas du jour au lendemain parce que :

  • Nous ne connaissons pas exactement le nombre d’individus présents par espèce dans les structures itinérantes en France.
  • Aujourd’hui nous n’avons pas le contrôle sur le flux des naissances et de la gestion des populations animales.  
  • Sur la base des estimations que nous avons fait des animaux présents en France, il n’y a pas assez de structures d’accueil.
  • La détention d’un animal non domestique est légale en France.
  • Nous prenons également en compte les humains dans l’équation.

Une date butoir à 6 ans comme il est noté dans la proposition de loi citée dans l’article de France 3 Région du 15/07/2019 n’est que marketing et paillettes pour faire plaisir aux humains mais condamnent les autres animaux à une mort certaine. Nous rejoingons d'ailleurs les propos de Céline Paterre (Les Pisteurs), une date aussi courte sans mesure de transition entrainerait "l'euthanasie des animaux, la vente ou la location vers d'autres pays et certainement une augmentation du commerce illégal qui existe déjà malheureusement en France, donc le développement d'une économie souterraine qui serait bien difficile à stopper. [arrêter]". Pour ces raisons, notre association souhaite l’arrêt sur le moyen terme avec une transition sur le court terme.

Afin d’y arriver nous proposons :

  • L’identification des animaux présents par espèces dans les cirques en France – afin de connaitre la situation en détail et pouvoir mettre en place des solutions adaptées fondées sur des faits.
  • L’arrêt de la reproduction et de toutes nouvelles acquisitions des animaux dans les cirques – afin de contrôler le flux des animaux présents dans les cirques en France
  • La mise en place de structures d’accueil publiques – afin d’accueillir les animaux dont les situations seront les plus critiques. Ces structures ne peuvent en aucun cas se mettre en place du jour au lendemain et ne peuvent en aucun cas satisfaire tous les animaux présents dans les cirques en France.

Enfin, soyons clair, les animaux captifs ne pourront en aucun cas être relâchés en milieu naturel car trop imprégnés à l’humain et ne disposant pas de tous les comportements qui permettraient leur survie en milieu naturel.

En conclusion, sur le papier nous sommes favorable à une date butoir (non fixée pour le moment) en réalité nous préférons être pragmatiques sur la réalité telle qu'elle est et préférons des revendications qui sont réalisables et pourront permettre une évolution positive vers la fin de l'exploitation des animaux sauvages dans les structures itinérantes en France. 

Nous ne rentrerons pas dans les détails de cette proposition de loi mais en bref et par exemple ne pas acheter un être vivant tombe sous le sens de nos valeurs (quelle est le prix d'une vie concrêtement ?).  

Notre association se désolidarise du contenu de cette proposition de loi mais tient néanmoins à saluer l’effort et la position des parlementaires à l’initiative. Peut-être ont-ils été mal conseillés sur le fond ?

En réponse à cet article de France 3 Région du 15/07/2019 - Les cirques avec animaux ne sont pas les bienvenus dans certaines villes des Hauts-de-France 

Autre article traitant le sujet et intéressant sur le site du Cercle Morel - 04/04/2019 

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Publié le: 
17/07/2019