Paroles de descendants d'esclaves

Ils sont poètes, écrivains, militants des droits civiques et mettent en parallèle l'asservissement des animaux avec le traitement qu'ont subi les esclaves noirs.

"Le cirque, un esclavage moderne"

Dick Grégory, militant des droits civiques, a été le compagnon de route de Martin Luther King.

Dick Grégory
Dick Grégory

En travaillant comme activiste des droits civils avec le Révérend Martin Luther King Jr., nous étions en quête de justice par des moyens pacifiques. Dans les années 60, j’ai participé à toutes les manifestations des droits civils, qu’elles soient « majeures » et la plupart « mineures », dont la Marche sur Washington et la Marche de Selma à Montgomery. Sous la conduite du Dr King, je me suis totalement engagé pour la non-violence, convaincu que la non-violence signifiait l’ opposition à la mise à mort, sous quelque forme que ce soit. J’ai ressenti le commandement « tu ne tueras point » appliqué aux être humains, non seulement dans leurs rapports les uns envers les autres -guerre, lynchage, assassinats, meurtres- mais aussi dans leurs pratiques à tuer les animaux pour la nourriture et le sport.

Il y a de simples résolutions que chacun d’entre nous peut prendre pour éliminer l’exploitation d’autres êtres. L’une d’elles est simplement de refuser d’aller voir tout cirque utilisant des animaux. Lorsque je regarde des animaux tenus captifs dans les cirques, cela me fait penser à l’esclavage. Les animaux dans les cirques représentent la domination et l’oppression que nous avons combattues pendant si longtemps. Ils portent les mêmes chaînes et les mêmes fers.

Quoiqu’en disent les gens du cirque, il n’y a pas d’autres moyens pour persuader un éléphant à « danser » ou un tigre à bondir à travers des cerceaux, sans la menace de la punition ou de la violence. Les dompteurs portent des fouets, les dresseurs d’éléphants utilisent des "pics" (instruments métalliques pointus et coupants utilisés à donner des coups, à piquer dans des endroits sensibles). Derrière les coulisses, les dompteurs utilisent souvent des aiguillons électriques et des massues pour arriver à leurs fins Les animaux des cirques sont encagés, enchaînés et forcés à travailler quand le « boss » l’exige. Ils n’ont jamais goûté à un instant de liberté, mais vont de la cage à la piste, de la piste à la cage. Ils voyagent pendant des milliers de kilomètres durant la pleine saison, ce qui signifie de longues heures dans des fourgons ou des remorques, sans espace pour se détendre, et pour ce qui est de courir, n’en parlons pas !

Ringling Bros. / Barnum & Bailey est l’un des cirques les plus prestigieux et des plus lucratifs dans le monde. Mais, cependant, il a été cité plus de 100 fois pour violation des droits à la protection animale (la seule loi fédérale de protection des animaux dans des spectacles itinérants). Cette année, 2 animaux du cirque Ringling sont morts sur la route. L’un fut Kenny, un bébé éléphant forcé d’exécuter des numéros lors de deux spectacles puis dans un troisième, alors qu’il était malade. Après le 3ème spectacle, il s’est couché et mourut. Kenny était âgé seulement de 3 ans et aurait pu rester avec sa mère, à l’état sauvage, pendant 15 ans. L’autre victime fut un tigre utilisé dans une publicité pour Ringling. Lorsque le tigre attaqua un dompteur, l’autre dompteur qui était sur scène renvoya l’animal dans sa cage, prit un fusil et tua le félin. Ces deux morts auraient pu être évitées, pas simplement parce que les situations auraient dû être mieux maîtrisées par ceux qui en avaient la responsabilité. Elles étaient inutiles parce qu’en tout premier lieu, les animaux n’auraient pas dû être emprisonnés.

Comme l’écrit Alice Walker, « les animaux du monde existent pour des raisons qui leur sont propres. Ils n’ont pas été faits pour les humains pas plus que les noirs ont été faits pour les blancs ou les femmes pour les hommes. » Les animaux et les humains souffrent et meurent de la même façon. La violence cause la même souffrance, le même flot de sang, la même puanteur de la mort, le même arrêt brutal de la vie, arrogant et cruel. Nous n’avons pas à y prendre part.

« Marin Independant Journal » (28/04/1998)

"La vie des autres"

Benjamin Zephaniah est un écrivain britannique d'origine jamaïcaine.

Benjamain Zephaniah

"La vie des animaux est aussi importante pour eux que notre propre vie l'est pour nous mêmes. Nous devons prendre leur défense, un peu comme les bonnes âmes qui à l'époque se sont opposé au commerce des esclaves.

L'esclavage n'est pas mort. Il est interdit par la loi mais il existe. Bien que les grands esprits le condamnent, il survit. Bien que les gens charitables le vilipendent, il prospère. La cruauté des coups, des lynchages et des brûlures est toujours la même, seulement les victimes sont différentes.

Qui de nos jours ne s'opposerait pas à l'esclavage ? Sauf que lorsque j'explique que les victimes sont maintenant les animaux esclaves qui sont battus et que l'on force à exécuter un numéro, que l'on entasse dans des élevages en batterie pour en faire de la nourriture pas chère ou que l'on torture de façon systématique dans les laboratoires, les gens hésitent. Il n'est pas facile, de nos jours, de regarder les mauvais traitements infligés aux animaux et de s'imaginer ce qu'en penseront les générations futures, un peu comme les négriers qui ont vendu des centaines de milliers d'esclaves humains ne pouvaient pas s'imaginer l'image qu'aurait cette activité aujourd'hui.

La raison pour laquelle je me suis impliqué dans le Projet de Libération Animale de PETA, que je vais aider à démarrer demain et qui va faire le tour des villes et des universités   dans tout le Royaume Uni, est qu'il présente de façon explicite l'expérience commune de ceux qui ont été opprimés : l'humain et l'animal. L'exposition juxtapose des images d'actes cruels qui sont aujourd'hui considérés comme inacceptable par la majorité des gens, (ex : l'asservissement, la décapitation, les massacres et le gavage, etc.) et des images qui montrent ces mêmes traitements infligés à des milliards d'animaux pour la production de nourriture, d'expérimentation, d'habillement et de divertissement. Les générations futures nous verront-elles avec le même oeil horrifié que celui qui est le nôtre lorsque nous lisons les histoires de bateaux chargés d'esclaves ? L'état d'esprit qui a permis que l'on commette ces atrocités envers des être humain, est le même que celui qui aujourd'hui permet qu'on les commette sur des animaux. La seule différence est que les victimes d'aujourd'hui qui sont maltraitées et exploitées car elles sont « différentes » et « impuissantes » appartiennent à une autre espèce. De nos jours des milliards d'animaux sont abattus, victimes d'expériences, empoisonnées, battus, enchaînés, noyés et disséqués. Ceci arrive de façon routinière, en dépit du fait que nous pouvons choisir des alternatives plus humaines et même si la science et le bon sens nous montrent que les animaux ont la faculté de penser, de souffrir, d'aimer, de se réjouir, d'être terrorisé et bien plus encore. Ceci arrive car les animaux ne peuvent pas nous empêcher de le faire.

Tous les animaux sont faits de chair, de sang et d'os, tout comme l'animal humain. Tous les animaux ont les mêmes 5 sens, ils s'occupent de leur famille, ont des personnalités individuelles et ne veulent pas mourir. Tous les animaux se rapprochent plus de l'humain qu'ils n'en diffèrent.

Parce qu'il est toujours mal d'opprimer et d'exploiter les plus faibles, il est toujours mal d'opprimer et d'exploiter les animaux. Parce que les victimes de la tyrannie actuelle ne peuvent pas s'exprimer, il revient aux gens de principes de parler pour eux. Nous devons les défendre, tout comme l'ont fait les bonnes âmes qui on parfois été jusqu'à perdre leur vie pour prendre la défense des enfants au travail et du droit de vote des femmes, nous devons nous battre contre les massacres ethniques et autres actes de violence.

Cela fait 200 ans que le parlement a banni le commerce des esclaves. Il est temps que cette compassion s'étende aux autres êtres exploités. Chaque jour, nous avons l'opportunité, de par ce que nous mangeons ou par ce que nous portons, de soutenir l'injustice ou de nous y opposer. Faisons le choix de ne pas contribuer à la cruauté, à la violence et à l'asservissement sous toutes ses formes."

The Guardian, 01/08/2007, traduit par Nathalie Dessi pour Code Animal.

"Ils n'ont pas été faits pour les humains"

Alice Walker, auteur de "La Couleur pourpre", a reçu le prix Pulitzer et l'American Book Award.

Alice Walker
Alice Walker

« Les animaux du monde existent pour des raisons qui leur sont propres. Ils n’ont pas été faits pour les humains pas plus que les noirs ont été faits pour les blancs ou les femmes pour les hommes. »